Nous sommes actuellement en pleine période d’inscription pour l’université. Plusieurs de nos hockeyeuses québécoises doivent choisir l’institution dans laquelle elles vont poursuivre leur carrière sportive. Cette décision n’est pas à prendre à la légère, car elle pourrait avoir un fort impact sur l’avenir de notre sport national. L’enjeu ici: l’exode des joueuses vers les universités américaines.

L'exode universitaire            L'exode universitaire

 

Cet enjeu est au cœur des préoccupations d’Isabelle Leclaire, l’entraîneur-chef du programme de hockey des Carabins de l’Université de Montréal.

«C’est une de mes cordes sensibles. Je tiens beaucoup à ce que nos hockeyeuses restent chez nous. Je suis vraiment dédiée à cet enjeu-là. D’ailleurs, je suis impliquée dans le sous comité hockey pour U Sports», dit-elle. 

L’exode universitaire est d’ailleurs un sujet dont parlent au quotidien plusieurs dirigeants du hockey universitaire canadien. Il y aurait du travail à faire en éducation pour mettre au grand jour cette réalité.

 

Le gazon est-il vraiment plus vert ailleurs? 

«Les gens ont une méconnaissance de ce qu’on fait ici. Pendant longtemps, il était considéré que rester chez nous coûtait plus cher que de s’exiler, mais ce n’est pas ça dans la réalité. Nos hockeyeuses peuvent recevoir des bourses de la Fondation de l’athlète d’excellence du Québec (FAEQ), ainsi qu’une bourse complète pour leurs études. Elles reçoivent même des crédits d’impôt du gouvernement.»

L’entraîneuse ajoute également que le niveau de jeu n’est pas supérieur aux États-Unis. Les matchs sont majoritairement serrés lorsqu’une institution universitaire affronte une équipe de nos voisins du Sud.

À ce sujet, Leclaire énumère des chiffres importants. «Selon des sondages effectués par la FAEQ, le taux de satisfaction pour les universités américaines est autour des 70-75%, alors que pour les universités québécoises ou canadiennes, le pourcentage est autour des 95%. Ici, c’est du sport-étudiant qu’on fait. Là-bas, c’est une business.»

 

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Un exode qui fait mal

Selon des chiffres rapportés par la FAEQ datant d’il y a quelques années, 75% des athlètes ayant étudié aux États-Unis ne seraient pas revenus au Québec cinq ans après leur graduation. La native de Lachine trouve cela choquant.

«C’est une perte énorme, oui pour le sport, mais quand on y pense de façon plus large, il y a un rapport humain important là-dedans. Ce sont des gens qui vont partir, qui vont rencontrer quelqu’un, qui auront peut-être des enfants et qui vont se trouver un stage ou un emploi. Ils ne reviendront pas ici. C’est une perte beaucoup plus grande que l’on pense parce qu’il y a des répercussions sur la société. On perd des femmes qui pourraient avoir les capacités pour combler des emplois importants.»

 

L’aspect humain du sport avec un grand H 

Le rapport humain est important dans le sport universitaire et coach Leclaire en fait un devoir. Dans le vestiaire de son équipe des Carabins de l’Université de Montréal, c’est inscrit:

«Pour être des champions, il faut d’abord être des gagnants.»        

 

Pour Isabelle, le terme gagnant prend son sens dans le comportement, les valeurs et la résilience. Jumelé ensemble, les chances d’être champion augmentent. Dans la défaite, il est aussi possible d’être satisfait puisque l’étudiante-athlète agit comme une gagnante.

La paye d’Isabelle Leclaire ne se compte pas en argent, mais plutôt en progrès. Elle aime voir ses hockeyeuses réussir après coup. La femme de hockey en retient beaucoup de gratitude. Elle est d’ailleurs d’avis que le hockey universitaire ne se joue pas uniquement sur la patinoire. Les parents aussi sont une partie intégrante dans l’équipe. Les Carabins ne forment pas uniquement une équipe de hockey universitaire, mais plutôt une grande famille.

 

Une équipe tissée serrée 

Le sentiment d’appartenance constitue l’un des éléments précieux du sport universitaire. À un moment donné, Alexandre Laganière qui travaillait avec l’équipe de football des Bleus, avait fait remplir deux fois l’autobus des Carabins pour amener des athlètes universitaires au match décisif de la finale contre l’Université McGill.

«Je me rappellerai toujours de ce moment-là. Pour moi, c’est comme si ça datait d’hier. L’ambiance était extraordinaire et notre foule était nettement dominante dans les estrades. Ça nous a bien aidé. On a gagné le championnat provincial ce soir-là!»

 

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Au sujet du Centre 21.02 créé par Danièle Sauvageau

Aux yeux d’Isabelle Leclaire Le Centre 21.02 constitue un avancement majeur. «Ce type de centre d’entraînement a fait ses preuves par le passé. Au-delà de tout ça, les filles universitaires ont enfin une avenue pour la suite de leur cheminement. Elles ont un endroit pour continuer leur développement, c’est super. C’est un bel ajout pour pouvoir créer notre réseau de joueuses qui pourraient faire partie d’une équipe professionnelle un jour. Avoir un seul emplacement.

 

Danièle Sauvageau

 

Il faut continuer d’aiguiser nos patins!

Il y a encore beaucoup de travail à faire pour réduire l’exode des joueuses canadiennes vers les États-Unis. Jouer pour une Université américaine, c’est prestigieux, mais en comparant les deux modèles, le jardin n’est pas nécessairement plus vert chez nos voisins. La popularité et la visibilité grandissantes de nos joueuses canadiennes et cette année de Jeux olympiques d’hiver aideront peut-être la cause. Espérons-le, tout comme la médaille d’or!